—  Eh bien ! comme chaque année, je me rendrai d'abord à Alloway où est né le plus grand poète du Royaume-Uni, Robert Bunis, et, si Dieu le veut, je prendrai part  quelques « Bums Suppers » où l'on récitera des vers, où des gens cultivés nous parleront du eénie disparu...

Phyllis Steward l'interrompit malicieusement :

—   Tout en buvant du whisky !

—   Parfaitement, miss, en buvant du vrai whisky, celui que vous autres Anglais n'avez jamais été capables de copier ! Puis, je gagnerai Dumfermline pour me recueillir sur les tombeaux de sept de nos rois et de Robert Bruce. Enfin, avant d aller me reposer chez moi à Callander, je m'arrêterai à Braemar pour assister aux Highlands Games et regarder balancer le caber.

Cette fois, ce fut Mary Bleazer qui intervint.

—   Le château de Balmoral est tout proche ?

—   Oui, oui, nous recevons beaucoup d'étrangers à cette occasion.

Chaque fois qu'elle avait des ennuis, Imogène mangeait bien car elle estimait qu'il fallait être en pleine forme pour résister aux vicissitudes de l'existence. Supposant que son altercation avec John Masbuny risquait d'amener de sérieuses complications, elle décida d'occuper sa soirée à préparer un hageis, ce plat écossais que Ton prépare avec du foie, ou cœur, de la farine d'avoine et des oignons, arrosant le tout de whisky qui tient lieu de sauce.

Il était près de minuit lorsque Imogène en eut terminé avec sa cuisine, mais, avant de se mettre au lit, elle fuma une cigarette en écoutant un disque des bagpipers des Scotch Guards. En passant devant la photographie de son père, elle lui cligna de l'œil en murmurant :

—  Vous avez vu, daddy, comment je les ai traités, ces Anglais, aujourd'hui ?